Permis de conduirePermis de conduire - LégislatifDélit d’entrave à la circulation : ce qui change avec la circulaire du 26 mars 2025

19 mai 2025

Vous avez peut-être entendu parler récemment du délit d’entrave à la circulation, notamment lors de célébrations de mariage ou de manifestations. Une nouvelle circulaire (JUSD2508747C) du 26 mars 2025 introduit une importante évolution : elle généralise désormais la possibilité de sanctionner ce délit par une amende forfaitaire délictuelle. Cette sanction permet d’éviter un procès en imposant une amende immédiate, mais elle a des conséquences juridiques sérieuses.

Explications détaillées par Maître Antoine Minier, avocat en droit routier à Carpentras et Avignon.

Barricade en feu sur une autoroute bloquant la circulation, illustrant un délit d’entrave routière lors d’une manifestation.

Le délit d’entrave à la circulation : cadre juridique et sanctions

Qu’est-ce que le délit d’entrave à la circulation ?

Prévu par l’article L.412-1 du Code de la route, ce délit concerne toute action visant intentionnellement à entraver ou gêner la circulation sur les voies publiques, notamment en plaçant ou en jetant des objets ou en se positionnant sur la chaussée.

Exemples concrets de délit d’entrave à la circulation :

  • Des manifestants qui s’allongent sur une route pour bloquer l’accès à une zone industrielle.
  • Des participants à un cortège de mariage qui stoppent volontairement les véhicules pour danser sur un rond-point.
  • Un automobiliste qui arrête son véhicule en travers de la chaussée pour protester contre une contravention.
  • Un groupe de militants qui dépose des palettes ou pneus sur une route pour bloquer l’accès à un site logistique.
  • Une opération de « barrage filtrant » organisée sans autorisation préfectorale et provoquant un ralentissement anormal.

Sanctions encourues

  • Une peine maximale de 2 ans d’emprisonnement ;
  • Une amende pouvant atteindre 4 500 euros ;
  • Des peines complémentaires comme la suspension du permis de conduire ou la confiscation du véhicule utilisé ;
  • Le retrait de 6 points au permis de conduire.

Avant la circulaire, toute personne poursuivie pour ce délit était convoquée devant le tribunal correctionnel, avec toutes les conséquences d’une procédure judiciaire classique (audition, instruction, audience).

Ce que change la circulaire du 26 mars 2025

Une généralisation de l’amende forfaitaire délictuelle (AFD)

La loi du 24 janvier 2023, applicable depuis le 17 avril 2024, avait déjà introduit à titre expérimental la possibilité de sanctionner ce délit via une amende forfaitaire délictuelle.

Elle était cependant limitée à certains parquets (Paris, Bobigny, Montpellier…). La circulaire JUSD2508747C généralise aujourd’hui cette procédure à l’ensemble du territoire.

Une sanction rapide sans convocation devant le juge

Pour rappel, le ministère public, représenté par le procureur de la République, dispose de ce qu’on appelle l’opportunité des poursuites. Cela signifie qu’il choisit s’il engage ou non des poursuites pénales, et selon quelle procédure, à l’encontre d’un justiciable qu’il considère comme auteur supposé d’une infraction.

L’amende forfaitaire délictuelle (AFD), prévue aux articles 495-17 et suivants du Code de procédure pénale, constitue une modalité alternative aux poursuites classiques. Elle permet de sanctionner un délit par le paiement d’une amende, sans instruction préalable ni débat contradictoire devant une juridiction.

En l’espèce, le procureur peut décider de ne pas saisir le tribunal correctionnel, mais de recourir à l’AFD, ce qui permet aux forces de l’ordre de verbaliser directement, par voie électronique, un conducteur ou un manifestant, sans même que celui-ci ait été entendu. C’est uniquement à la réception de l’avis d’amende que le justiciable est informé des poursuites engagées et de la sanction prononcée à son encontre.

Les conditions d’application de l’AFD

  • L’infraction doit être simple et caractérisée ;
  • L’auteur ne doit pas être mineur ni en récidive ;
  • Absence de circonstances aggravantes ;

Quel montant pour l’amende forfaitaire ?

  • Le montant forfaitaire de l’amende pour l’infraction d’entrave à la circulation est relativement dissuasif :
    • 800 euros si elle est réglée dans un délai de 45 jours ;
    • 1 600 euros en cas de majoration pour paiement tardif (après les 45 jours).

Quelles conséquences pour les personnes verbalisées ?

Si la procédure d’AFD paraît relativement simple, elle n’en est pas moins lourde de conséquences : 

  • Elle vaut reconnaissance de culpabilité dès le paiement de l’amende;
  • Elle entraîne une inscription au casier judiciaire (bulletin n° 2) ;
  • Elle restreint l’accès du justiciable à un débat contradictoire ; 
  • Toute erreur de forme quant à la contestation entraînera le rejet de la requête et limitera d’autant plus l’accès du justiciable au juge.

Par ailleurs, le pouvoir décisionnaire laissé à l’agent verbalisateur rend possibles des erreurs d’appréciation. Une entrave involontaire ou passagère peut être sanctionnée sans que le conducteur en ait conscience.

Pourquoi faire appel à un avocat ?

En cas de verbalisation pour entrave à la circulation, un avocat peut intervenir pour :

  • vérifier la régularité de la procédure ;
  • identifier des erreurs ou vices de forme ;
  • rédiger une contestation conforme aux délais et aux exigences de fond ;
  • vous assister devant le tribunal correctionnel  ;
  • éviter une inscription de la peine au bulletin n°2 du casier judiciaire ; 
  • obtenir une dispense de peine.

L’accompagnement d’un avocat permet de mieux comprendre ses droits, de préparer une stratégie de défense et, dans certains cas, de faire échec à la verbalisation.

La circulaire du 26 mars 2025 modifie en profondeur le traitement du délit d’entrave à la circulation. En généralisant la simplification des poursuites grâce à l’AFD, elle facilite une répression rapide, mais expose aussi les justiciables à des sanctions automatiques. Si vous recevez une amende forfaitaire pour entrave à la circulation, ne restez pas seul face à cette décision un avocat en droit routier peut vous aider à contester efficacement la sanction et à préserver vos droits.

F.A.Q Délit d’entrave à la circulation

Le blocage d’une route lors d’une manifestation est-il toujours un délit d’entrave ?

Non, le blocage d’une route n’est un délit que s’il est intentionnel et non autorisé. Les manifestations déclarées en préfecture avec un parcours défini ne constituent pas un délit d’entrave. En revanche, tout blocage spontané ou débordant du cadre autorisé peut être sanctionné.

Puis-je contester une amende forfaitaire pour entrave à la circulation ?

Oui, vous disposez de 45 jours pour contester l’amende forfaitaire délictuelle. La contestation doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception au service indiqué sur l’avis. Attention : toute contestation mal formulée peut être rejetée d’office, d’où l’importance de se faire accompagner par un avocat.

Quelle différence entre le délit d’entrave et la contravention de stationnement gênant ?

Le stationnement gênant est une simple contravention (135 €) sanctionnant un véhicule mal garé. Le délit d’entrave nécessite une intention de bloquer la circulation et peut être réprimé par de l’emprisonnement ferme (2 ans). L’élément intentionnel doit donc être matérialisé.

Les cortèges de mariage sont-ils concernés par ce délit ?

Oui, les cortèges de mariage qui bloquent volontairement la circulation (arrêt sur rond-point, ralentissement excessif) peuvent être verbalisés. Les klaxons intempestifs constituent une infraction distincte. Il est recommandé de prévenir la mairie ou la police municipale pour éviter toute verbalisation.

L’amende forfaitaire apparaît-elle au casier judiciaire ?

Oui, contrairement aux contraventions routières classiques, l’amende forfaitaire délictuelle entraîne une inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire. Cette inscription peut avoir des conséquences pour certains emplois ou démarches administratives.

Peut-on être verbalisé sans avoir été interpellé sur place ?

Oui, avec la procédure d’amende forfaitaire délictuelle, les forces de l’ordre peuvent verbaliser à distance via le système de verbalisation électronique. Vous recevrez alors l’avis d’amende à votre domicile sans avoir été auditionné.

Combien de points perdrai-je sur mon permis de conduire ?

Le délit d’entrave à la circulation entraîne automatiquement la perte de 6 points sur votre permis de conduire, même si vous payez l’amende forfaitaire. Cette sanction s’ajoute à l’amende de 800 €.

Les mineurs peuvent-ils recevoir une amende forfaitaire pour ce délit ?

Non, les mineurs sont exclus du dispositif d’amende forfaitaire délictuelle. Ils doivent obligatoirement être convoqués devant le tribunal pour enfants, conformément aux règles de la justice des mineurs.

Quelle est la différence entre payer l’amende et la contester ?

Payer l’amende équivaut à reconnaître votre culpabilité et met fin aux poursuites. Contester permet de demander à être jugé par un tribunal où vous pourrez présenter votre défense. Attention : une contestation rejetée peut entraîner une amende plus élevée que l’amende forfaitaire.

Un avocat est-il vraiment nécessaire pour contester cette amende ?

Bien que non obligatoire, l’avocat est vivement recommandé. La procédure de contestation est technique et tout vice de forme entraîne un rejet. L’avocat vérifiera la régularité de la procédure, identifiera les moyens de défense et rédigera une contestation conforme aux exigences légales.

Que se passe-t-il si je ne paie pas l’amende dans les délais ?

L’amende passe de 800 € à 1 600 € après 45 jours. Des poursuites peuvent être engagées pour recouvrement forcé (saisie sur salaire, blocage des comptes). Le non-paiement n’efface pas la condamnation qui reste inscrite au casier judiciaire.