Non classéRadars intelligents 2025 : tout comprendre avant la généralisation

5 août 2025

Les « radars intelligents » — parfois appelés radars IA — devraient bientôt transformer en profondeur la répression des infractions routières. Depuis la loi de finances 2025, ils disposent d’une véritable assise budgétaire et d’une feuille de route nationale : leur logiciel, dopé à l’intelligence artificielle, est capable de repérer bien plus que de simples excès de vitesse. Avant de recevoir un premier avis de contravention, il est donc nécessaire de savoir comment ces radars fonctionnent, quelles infractions ils pourront constater et quels recours resteront ouverts aux automobilistes. Explications complètes par Maître Minier, expert en droit routier.

Radar Mesta Fusion 2 sur route de campagne détectant un conducteur au téléphone, ceinture bouclée, éléments encadrés en rouge.

Radars intelligents 2025 : comment l’IA change la donne

La loi n° 2025-127 du 14 février 2025 consacre 46,3 millions d’euros à la « modernisation du système automatisé de contrôle routier » et prévoit de faire passer le parc national de 4 000 à 4 160 appareils d’ici fin 2025. Plutôt que d’installer de nouveaux boîtiers, l’État va mettre à jour les radars Mesta Fusion 2 (radars tourelles de 4 mètres déjà massivement implantés) : une couche logicielle d’IA analyse désormais les images en temps réel, repère un comportement suspect, puis déclenche la prise de vue.

En pratique : l’algorithme suit jusqu’à 126 véhicules sur cinq voies, détecte une infraction, stocke la preuve cryptée et la transmet au CACIR (Centre automatisé de constatation des infractions routières) pour validation humaine obligatoire. Le ministère table sur un taux de fiabilité supérieur à 95 % avant émission du PV.

Ce que prévoit la loi de finances 2025

La mesure figure dans la mission « Sécurité et éducation routières » du budget 2025. Le Gouvernement présente cette modernisation comme un investissement dans la prévention, justifiant l’usage de l’IA par « la nécessité d’identifier des comportements à haut risque qui ne peuvent pas toujours être interceptés en flagrant délit ». Le texte :

  • ouvre un crédit de 46,3 M€ pour 2025 (hors entretien courant) ;
  • autorise la mise à niveau logicielle de radars déjà amortis — solution moins coûteuse qu’un changement de matériel ;
  • prévoit un déploiement progressif 2025-2027, « conditionné aux homologations techniques » (réponse ministérielle au Sénat du 3 avril 2025).

Au 5 août 2025, aucun arrêté d’homologation n’a encore été publié pour les fonctions IA ; en l’état, aucun PV automatique n’est émis pour téléphone, ceinture ou distances de sécurité. Le dispositif reste en phase d’essais, ce qui constitue un axe de défense solide en cas de verbalisation erronée.

Les trois nouvelles infractions détectées automatiquement

Infraction Comment la caméra l’identifie Amende Points
Téléphone tenu en main Reconnaissance d’objets + position de la main près de l’oreille / du volant 135 € 3
Non-port de la ceinture Analyse des pixels contrastés sur le torse et des ancrages de siège 135 € 3
Distances de sécurité insuffisantes Calcul de l’intervalle spatio-temporel entre deux plaques sur une même voie 135 € 3

Les sanctions se cumulent : un conducteur distrait peut perdre jusqu’à 9 points et payer 405 € pour un seul passage devant la tourelle.

Comment fonctionne la détection par IA ?

  • Capteurs haute technologie : la tourelle Mesta Fusion 2 dispose d’un capteur optique 36 Mpx et d’une antenne radar Doppler multi-cible avec faisceau 3D pour mesurer les distances et suivre les trajectoires.
  • Analyse temps réel : les algorithmes d’intelligence artificielle analysent les images en continu et comparent les comportements détectés à des modèles prédéfinis (téléphone, ceinture, distances de sécurité).
  • Filtrage automatique : seuls les clichés dépassant un seuil de confiance prédéterminé sont transmis au CACIR ; les autres sont automatiquement supprimés.
  • Contrôle humain : un agent assermenté confirme l’infraction avant d’émettre le PV. Cette étape maintient aujourd’hui la responsabilité de l’État en cas d’erreur.

Le ministère de l’Intérieur insiste sur le fait que l’IA « n’a pas le dernier mot » ; la captation dans l’habitacle soulève cependant des questions RGPD importantes (visages de passagers, enfants mineurs, données biométriques). Ces dispositifs sont soumis au règlement européen sur l’IA entré en vigueur en août 2024, qui encadre spécifiquement les systèmes d’IA utilisés à des fins répressives. La CNIL, déjà compétente pour contrôler les radars automatiques depuis 2003, veillera au respect du cadre juridique existant en matière de protection des données personnelles.

Quels risques pour les automobilistes ?

Ces nouveaux « super-radars » changent complètement la donne. Là où un radar classique ne sanctionnait qu’un excès de vitesse, les modèles IA peuvent identifier plusieurs comportements dans la même séquence : un conducteur peut ainsi recevoir trois PV distincts pour un seul passage devant la tourelle.

Les conséquences en cascade

Prenons l’exemple d’un conducteur « lambda » avec 8 points sur son permis. S’il cumule téléphone + absence de ceinture + distance insuffisante, il perd instantanément 9 points et se retrouve en situation d’invalidation. 

Pour le jeune conducteur, les conséquences sont particulièrement lourdes : avec seulement 6 points en période probatoire, deux infractions simultanées suffisent déjà à perdre le permis.

Le piège temporel

Ces infractions multiples arrivent souvent par courrier groupé, laissant peu de temps pour organiser sa défense. Entre la réception du PV et l’expiration du délai de contestation (30 à 45 jours selon le mode d’envoi), l’automobiliste doit rapidement évaluer ses chances et, le cas échéant, solliciter un avocat.

Vos droits face aux radars intelligents

Le principe

Même automatisée, la verbalisation reste un acte de police administrative. L’administration doit donc être en mesure de prouver :

  • la régularité du matériel (radar homologué) ;
  • la réalité de l’infraction (image lisible et horodatée) ;
  • la chaîne de confiance (agent identifiant et validant la photo).

Les leviers de contestation

Argument exemple concret
Vice de procédure Démontrer qu’aucun décret d’homologation n’était publié à la date de l’infraction.
Erreur de détection Objet confondu avec un téléphone ; ceinture masquée par un vêtement.
Absence de désignation certaine du conducteur Photo prise de trois-quarts arrière, visage non identifiable.
Atteinte à la vie privée Visage d’un enfant non masqué ; capture d’un passager sans lien avec l’infraction.

Comment contester un PV radar IA ?

Si vous recevez malgré tout un avis de contravention, voici la marche à suivre :

  • Ne réglez pas immédiatement si vous envisagez une contestation.
  • Choisissez votre mode de contestation (délai : 45 jours) :
    • En ligne (recommandé) : sur le site de l’ANTAI (www.antai.gouv.fr) – section « Désigner ou contester ».
    • Par courrier RAR : à l’Officier du ministère public (OMP) mentionné sur l’avis.
  • Joignez les pièces obligatoires :
    • Avis de contravention original
    • Pièce d’identité
    • Certificat d’immatriculation
    • Consignation si demandée (sauf cas exemptés)
  • Exposez clairement vos arguments (vice d’homologation, erreur matérielle, autre conducteur…).
  • Sollicitez la relaxe ou la requalification.

En cas de rejet, déposez un recours devant le tribunal judiciaire (ex-tribunal de police) ; un avocat en droit routier maximisera vos chances, notamment pour plaider l’absence de décret technique ou la non-conformité RGPD.

 

 


Les radars intelligents représentent l’une des plus grandes évolutions du contrôle routier depuis l’apparition des radars automatiques en 2003. Ils doivent améliorer la sécurité et réprimer des comportements réellement dangereux, mais leur déploiement soulève des questions inédites : fiabilité de l’IA, protection des données et respect des droits de la défense. Tant que le cadre réglementaire n’est pas totalement stabilisé, chaque conducteur conserve une marge de contestation réelle.

Besoin d’aide ? Le cabinet Maître Antoine Minier, avocat en droit routier à Carpentras et Avignon, vérifie la régularité de votre PV et met en place la stratégie adaptée pour protéger votre permis.

F.A.Q. Radars intelligents 2025

Les radars IA verbalisent-ils déjà ?

Non. En date du 5 août 2025, aucun arrêté d’homologation n’a encore été publié au Journal officiel. Les radars collectent seulement des clichés tests ; aucun PV n’est donc envoyé pour téléphone, ceinture ou distance de sécurité.

Quelles infractions seront concernées par les radars IA ?
  • Téléphone tenu en main,
  • Non-port de la ceinture de sécurité,
  • Non-respect des distances de sécurité.

Chacune est punie d’une amende forfaitaire de 135 € et d’un retrait de 3 points.

Les sanctions se cumulent-elles ?

Oui. Si les trois infractions sont relevées en même temps, l’automobiliste risque 405 € d’amende et 9 points.

Comment savoir si j’ai été flashé par un radar IA ?

Comme pour un radar classique : l’avis de contravention arrive par courrier (ou par courriel). Aucun contrôle sur le bord de la route.

Puis-je demander la photo ?

Oui. Vous pouvez l’obtenir gratuitement sur le site de l’ANTAI ou par courrier en joignant une copie de l’avis de contravention. Elle peut servir à contester si le conducteur n’est pas clairement identifiable.

Les radars IA respectent-ils la vie privée ?

Le fabricant affirme ne pas recourir à la reconnaissance faciale et limiter l’image à l’habitacle. La CNIL étudie encore le dispositif ; la durée de conservation sera fixée dans l’arrêté d’homologation.

Où seront installés les premiers radars IA ?

Le ministère vise environ 4 160 cabines opérationnelles sur les grands axes. L’emplacement des 4 000 cabines déjà en service qui seront mises à jour est disponible sur la carte interactive officielle.
En revanche, les 160 cabines supplémentaires qui doivent porter le parc à 4 160 radars opérationnels fin 2025 (objectif inscrit dans le Projet annuel de performances 2025) n’ont pas encore de localisation officielle.